Chers paroissiens, chers amis,
Nous voici arrivés à la période estivale, période de vacances pour les enfants, parfois pour les parents. Période de transhumance pour certains qui rejoignent leur famille, une maison, une région habituelle. Période plus sobre aussi en paroisse où beaucoup d’activités comme le catéchisme, les formations du jeudi, les répétitions et les divers ateliers s’arrêtent. Période parfois plus amère pour certains, pour ceux qui n’ont pas la chance de partir, ceux qui continuent à travailler, ceux qui sont attachés au rythme de l’année, à telle ou telle activité. Qu’on se réjouisse ou qu’on s’inquiète de cette période estivale, il est bon de l’anticiper, d’y réfléchir et de savoir ce que l’on veut en faire.
Changer de rythme, s’arrêter peut s’avérer douloureux ou angoissant suivant les personnalités mais cela demeure nécessaire. Dès les premières pages de la genèse, le récit de la création aboutit au septième jour où Dieu marque une pause : “Dieu acheva au septième jour son œuvre qu’il avait faite ; et il se reposa au septième jour de toute son œuvre, qu’il avait faite” (Gn 2:1-2). Mais ce que l’on traduit habituellement par “se reposa” est le mot hébreux Shabbat qui peut aussi être traduit de bien des façons : Dieu se reposa, Dieu s’interrompit, Dieu mit un terme, Dieu célébra,… autant de verbe qui traduisent Shabbat. Ainsi on comprend que Dieu n’est évidemment pas fatigué après son œuvre de création mais qu’Il sait s’arrêter pour contempler, se réjouir de ce qu’Il a fait et voir que tout cela est beau.
Tout cela peut déjà nous éclairer sur la façon de vivre ce temps d’été.
Il s’agit déjà de mettre un terme à une période, comme un met une borne pour délimiter un champ, afin de ne pas s’emballer dans une activité sans fin. Savoir appuyer sur le bouton pause, relever la tête du guidon pour voir où on est, le chemin parcouru. C’est aussi le sens du repos : se re-poser c’est se poser à nouveau. On a choisi un chemin en début d’année, une direction, une activité,… on se pose à nouveau pour regarder ce qui a été fait.
Cette pose et cette pause permettent une récréation : en arrêtant de s’agiter, de courir, de faire tourner telle ou telle question (comme un hamster dans sa cage), on va pouvoir créer à nouveau, re-créer. Comme un lac qui retrouve sa tranquillité le soir après le départ des baigneurs, nos pensées sont plus claires, plus limpides quand l’agitation cesse. Le fond du lac apparaît avec ses trésors de couleurs, de même la pause donne le temps d’un regard plus profond sur ce qui a été fait, une vue d’ensemble devient possible et nous pouvons, tout comme Dieu, voir ce qui a été bon. Et on a le droit de s’en réjouir, d’être fier du travail effectué. Le regard de Dieu est toujours bienveillant ; en épousant ce regard, on applique cette bienveillance sur la période passée, sur ce qui a été réalisé. Tout ne sera jamais parfait, ce serait de l’orgueil de le regretter mais tout peut acquérir du sens.
Ce temps estival sera alors l’occasion de célébrer ce qui a été fait, d’en faire mémoire, de le raconter, le partager. En rendant grâce à Dieu pour le chemin parcouru, pour les joies ou les simples sourires qui ont pu parsemer cette période, on verra qu’Il était présent, que ce qui a été semé n’est pas perdu. On pourra se re-poser en Dieu, renouveler notre confiance en Lui et ainsi apprendre à… dormir ! Dormir fait partie du repos et ce peut être aussi un bel exercice de confiance en Dieu. Charles Péguy, prêtant ses mots à Dieu, nous en montre l’évidence :
“ On me dit qu’il y a des hommes qui travaillent bien et qui dorment mal. Qui ne dorment pas… Je les plains. Je leur en veux même un peu. Ils ne me font pas confiance. Comme l’enfant se couche innocent dans les bras de sa mère ainsi ils ne se couchent point, innocents dans les bras de Ma Providence. Ils ont le courage de travailler. Ils n’ont pas le courage de ne rien faire. Ils ont la vertu de travailler. Ils n’ont pas la vertu de ne rien faire. De se détendre. De se reposer. De dormir…. Ils gouvernent très bien leurs affaires pendant le jour. Mais ils ne veulent pas m’en confier le gouvernement pendant la nuit. Comme si je n’étais pas capable d’en assurer le gouvernement pendant une nuit.”
Bonnes et saintes vacances à tous, reposez-vous bien.
P. Arnaud